Le tutorat est à la mode. Il s'applique bien entendu à l'alternance mais participe aussi de plus en plus à l'accompagnement des nouvelles recrues ou encore des salariés en mobilité interne.
Dispositifs pour sénior
Le gouvernement y voit une très bonne occasion de développer le taux d'activité des seniors. Nombreuses sont d'ailleurs les entreprises à circonscrire le tutorat aux seniors. Chez ArcelorMittal, le temps des préretraites est bien fini mais les seniors sont éligibles à un temps partiel fin de carrière (travailler à 50% en touchant 80 de son salaire) entièrement dévolu au tutorat. Le tutorat peut même servir à justifier des formes de préretraites. Ainsi, à la Monnaie de Paris, le Congé Mission Expérience Senior s'adresse aux salariés de plus de 57 ans. Ces derniers pourront se « mettre en congé » en touchant 65 % de leur salaire de référence, en attendant une retraite à taux plein. Au cours de cette période de transition, ils pourront être amenés à effectuer entre 4 et 24 mois de tutorat en étant alors rémunérés à 100 %. « L'accord GPEC prévoyait que les salariés qui étaient à un an d'une retraite à taux plein puissent effectuer un an de tutorat. Mais sur notre site, classé amiante, il n'y a quasiment plus de tuteurs puisque tous les salariés de plus de 55 ans ont déjà quitté l'établissement », explique Serge Gonnelaz, délégué syndical CFDT du site Isérois de Valéo de l'Isle d'Abeau (38).
Les freins à la professionnalisation
Alors que l'âge moyen des tuteurs de Veolia se situe entre 30 et 45 ans, le rapport sur le tutorat que va remettre Bernard Masingue, directeur de la formation corporate du groupe, à Laurent Wauquiez, le secrétaire d'Etat à l'emploi ne risque pas de réduire le tutorat aux seniors. Ce serait le meilleur moyen de dévaloriser un rôle qui n'en a pas besoin. Au sein de la filiale Dalkia de Veolia, le tutorat constitue même un sas pour accéder à l'encadrement. L'accent est mis sur la professionnalisation de la mission tutorale. Et cela d'autant plus que Veolia recrute tous ses apprentis. Une première forme de reconnaissance pour les tuteurs.
« Nous contribuons à former des jeunes que l'entreprise ne se donne plus les moyens de recruter comme c'était le cas dans les années 90. C'est très frustrant de les voir partir. Surtout quand on découvre des talents », lance Hervé Galichet, tuteur régulier en poste au sein de la direction informatique de 3M et délégué CFDT. Aujourd'hui, les entreprises cherchent avant tout à atteindre le taux de 3% d'alternants pour s'éviter une majoration de la taxe d'apprentissage (2 millions d'euros de majoration pour Air France par exemple). Le recrutement des apprentis n'est pas la priorité. Pas même l'obtention du diplôme. On confond quantitatif et qualitatif. L'accord sur le tutorat de Snecma prévoit une prime mensuelle de 120 € euros pour les tuteurs. « Cette reconnaissance financière est automatique. Elle ne dépend pas d'objectifs comme par exemple l'obtention ou non du diplôme par le jeune », souligne Dansou Gbenouvo, délégué syndical CFTC de cette filiale du groupe Safran. « Il n'y a pas besoin de mettre des indicateurs partout. Bien entendu que l'objectif de la mission est de faire en sorte que l'apprenti obtienne son diplôme. Nous sommes sur la base du volontariat », nuance Denis Pivette, délégué syndical CFE-CGC de Schneider Electric, entreprise porte-drapeau de la charte de l'apprentissage en 2005.
Les entreprises sont majoritairement réticentes à accorder des primes de tutorat. « Nous avions demandé une reconnaissance financière pour les tuteurs mais celle-ci a été refusée », précise Hervé Provost, délégué syndical FO de Schneider Electric et président de la commission emploi formation du comité de groupe qui se déclare néanmoins « fier » de l'accord signé. Si les tuteurs ne perçoivent pas de primes, les apprentis diplômés bénéficient en revanche d'une prime qui représente 5% de la la rémunération perçue tout au long de l'apprentissage...
Selon Jean-Jacques Arrighi, chercheur au Cereq (Centre d’études et de recherches sur les qualifications) « acter qu’il y a une qualification particulière du maître d’apprentissage, et donc que cela peut entraîner une rémunération supplémentaire, les organisations et réseaux patronaux ne veulent pas en entendre parler » Reste aux tuteurs à se reconvertir dans le coaching. La frontière est mince. Dans les deux cas, il s'agit bien d'un accompagnement individualisé pour atteindre un objectif.
Source : Miroir social
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